Où l'on parle d'une autre manière de la Confédération

L'ordre, la tradition et ... Falde. Ils n'avaient que ces mots à la bouche et pour le pire et le meilleur, lui aussi. Commandant en chef d'une armée de Dinar passée aux ordres du Stratège, Gereth était tout sauf un idiot. Selon les critères faldiens du moins. Dirigeant une compagnie de quelques mille cinq cent hommes, et alors que toute la confédération était assignée aux préparatifs de guerre, sa "mission" consistait à planter des arbres. En conclusion, selon lui, tout partait en vrille et le Stratège devenait gâteux.

Ça, c'était avant les combats et l'invasion Ganondienne. Difficile de savoir qui l'avait emporté mais la confédération avait en tous les cas subi des pertes incommensurables, une grande partie de son territoire ravagée par les flammes des Félons. On chuchotait que le Royaume des pilleurs et des lâches ne valait guère mieux et que les dégâts étaient tout autant sévères. Le plus grave restait cependant les déclarations de guerre de deux autres patries, les tajiks et le peuple des arbres au nom imprononçable. C'était là que Gereth entrait d'ailleurs en jeu.

Sylvia a écrit:"Seigneur,
Je vous enverais certains de nos meilleurs experts dans le soin des arbres. J'espère qu'ils sauront enseigner à votre peuple comment préserver, soigner et replanter les différents végétaux que vous aurez pu sauver des flammes, car il est toujours préférable de concerver la répartition naturelle des pousses entre elles, pour ne pas ruiner la fertilité de la terre environante.
Si besoin, je met également à votre disposition un sac avec un échantillon de quelques unes de nos espèces d'arbres et de buissons les plus courants et utiles à l'harmonie d'une forêt à croissance rapide."

Sa nouvelle mission consistait tout simplement à accueillir ces étrangers et à les escorter là où les combats avaient fait rage. Bref, c'était délicat. En pleine guerre et avec cette série inarrêtable de pillages de tous genre, cette nouvelle folie était signée d'une simple nom : Fineos.

A ses côtés se tenait le dirigeant de l'expédition Ai'Teshi qui tentait tant bien que mal de lui expliquer pourquoi planter toutes les graines au même endroit n'allait pas forcément donner une magnifique et immense forêt. C'est à cet instant qu'arrivèrent les premiers messagers : une troupe non identifiée approchait des frontières de la confédération, les nouveaux ordres du stratège étaient de la stopper et de l'empêcher de se livrer au pillage. L'armée du doge Thab venait enfin d'être affectés à une mission où des combats auraient lieu. Ils arrivèrent à la frontière avec les cavaliers, environ 500 qui avaient tout donné dans la course. Le poste de garde était ravagé mais l'horreur était loin d'être terminée.

- "Commandant Gereth ?
- Oui ?
- Nous avons trouvé le village de Bormath, il est, enfin était, enfin je crois que vous devriez venir voir..."

Le lac de Bormath était assez petit à côté de ceux de Laher ou d'Iziania, une forêt le couvrait de chaque côté, laissant seulement un hameau émerger d'une clairière aux abords d'un espace de pêche fertile et traditionnel. Quelques cinquante âmes vivaient là en presque totale autarcie, les contacts avec la Confédération étant limités aux réunions du Conseil des Doges ou plutôt à leurs rapports. Toujours accompagnés des Ai'Teshi, le commandant avançait au creux d'un chemin couvert par les arbres. Ce fut tout d'abord l'odeur qui parvint à leur nez. Enfin, dans la nuit assez sombre, les premières lueurs dansèrent entre les cimes des arbres centenaires tandis qu'un silence pesant, contrastant avec ce jeu de lumière, résonnait dans les oreilles de la petite vingtaine de cavaliers. Ils parvinrent alors à l'orée du village de Bormath. Ils virent un enfant, une flèche plantée dans le dos, le visage tourné vers les habitations, remuant faiblement un pied, en un réflexe postmortem. Quelques pas plus loin, le cadavre d'une femme, le corps ravagé sous les assauts des Ganondiens, était laissé à la proie des volatiles qui déjà criaient au festin. Les masures, en bois, n'avaient probablement pas tenu plus que quelques décimes et un toit encore fumant s'écroula à quelques pas de leur position. Ils mirent pied à terre, les Ai'Teshi restant en arrière. Le feu avait pris au niveau du village et paraissait désormais s'étendre sur des lieues au Nord. La fumée libérée par ce carnage tournait aux grés du vent et ce qui était autrefois une verdoyante forêt n'était désormais plus qu'un amoncellement de cadavres naturels s'accouplant les uns aux autres en une danse macabre : celle de la fin.

Les coupables furent rattrapés près de Nabi Rchde, plusieurs armées Doges faisant la jonction avec les troupes de Gereth, commandant de Thab. La victoire, peut-être mais encore une fois le pays était en flammes et le désert s'agrandissait petit à petit, les bonnes gens disparassaient, les vautours prenaient leur place dans ce vide laissé par l'abandon de tout espoir. Oui ils allaient replanter mais qui demain protégerait ces arbres ?